Hotel d’Escoville – 12 Place Saint Pierre – 14000 CAEN – Tél. : 02 31 86 14 16

Historique

Hôtel le Valois d'Escoville

    Siège historique et actuel de l'Académie

    Toute l'histoire de l'Académie se rattache à cet Hôtel du "Grand Cheval"

    Origine

    Désigné sous le nom de son fondateur : Nicolas Le Valois d'Escoville, et aussi pendant longtemps sous le nom d'hôtel du Grand Cheval jusqu'au XIXe siècle, l'Hôtel, siège de l'Académie a été construit par la famille Le Valois. Celle-ci était une ancienne famille lexovienne qui joua un rôle important à Lisieux puis à Caen.

    Nicolas Le Valois, né du mariage de Jean le Valois avec Charlotte La Bigne, naquit en 1495 et donna la notoriété à cette famille.

    Nicolas Le Valois eut 4 ou 5 fils, selon les auteurs, entre autres :

    • Louis ,Vicomte de Caen, tige de la lignée des Seigneurs de Fontaine-Etoupefour.
    • François, tige des Seigneurs d'Escoville.
    • Jean, Seigneur de Mesnil Guillaume; ce Jean était Gentilhomme de la Chambre du Roi et fut le dernier des Le Valois qui ait possédé l'Hôtel d'Escoville qu'il vendit dès 1603 à un riche commerçant de Rouen, Guillaume Moisant.

    La maison LeValois devait d'ailleurs s'éteindre rapidement.

    Nous parlons de Nicolas Le Valois, car sa personnalité de travailleur acharné qui employait ses loisirs à des études philosophiques, et à des recherches mystérieuses d'alchimie, explique certainement les décorations sculptées qu'il a inspirées.

    Nicolas Le Valois d'Escoville ne devait pas jouir longtemps de cette splendide demeure :

     

    " Le vendredy, jour et feste des Rois 1541, Nicolas Le Valois, seigneur d'Escoville, Fontaine, Mesnil-Guillaume et Manneville, le plus opulent de la ville lors, ainsy qu'il se devoit asseoir à table, à la salle du Pavillon de ce beau et superbe logis, près le carrefour Saint-Pierre, qu'il avait faict bastir l'an précédent, en mangeant une huistre à l'écalle, luy aagé d'environ quarante-sept ans, tomba mort subitement d'une apoplexie qui le suffoqua".

     

    (M. de Bras) C'était le 6 janvier 1541.

    Le quartier Saint-Pierre, situé aux abords du château, renfermait les habitations des familles les plus opulentes de la ville, … nombreuses, et cet endroit (qui était donc au cœur de la ville). Ceci explique en grande partie les origines et la destinée de l'Hôtel d'Escoville où siégeront les services de l'Hôtel de Ville, l'Académie et plus tard la juridiction consulaire, la Bourse de Commerce. La demeure était vaste et somptueuse et elle était bien située dans un quartier central.

    Construction

    En 1531, l'achat de la maison de Jean de La Vigne est donc suivi de sa destruction.

    En 1533, se construit le pavillon de face (lorsque l'on entre dans la cour) et son aile en retour terminée en 1535, comme l'indiquent les dates inscrites sur les meneaux.
    En 1537, s'élève le grand corps de logis en bordure de la Place Saint-Pierre
    Lors de la construction, on trouve dans les fondations du "vif argent" (mercure) en quantité importante, un" plein pot d' estain", rapporté à un filon minier, ou pour d'autres le fait qu'un apothicaire avait eu sa boutique en ces lieux.

    L'architecte ? plusieurs hypothèses

    • Un habile constructeur qui aurait également été l'auteur du château de Fontaine-Henri et de Lasson, des Hôtels de Duval de Mondrainville à Caen et d'autres édifices remarquables de la Renaissance en Normandie.
    • Hector Sohier, le merveilleux constructeur de l'abside de Saint-Pierre, proche, qui présente une infinité de détails identiques.
    • En dernière analyse, le rôle d'architecte serait attribué à Blaise Leprestre, Maître maçon caennais, dont la réputation au début du XVIe siècle fut considérable. En tout cas, la porte d'entrée donnant Place Saint-Pierre lui est attribuée indéniablement par un texte de Cahaignes, et de ce fait, peut-être, l'ensemble du corps de bâtiment le long de la Place Saint-Pierre, ce dernier construit en 1537.

    Les sculpteurs ? Sans doute des sculpteurs locaux d'une part pour les motifs décoratifs, mais sûrement des artistes italiens pour les figures de Judith et David, semblables aux œuvres florentines de l'époque.

    Siège de l'académie

    Après la mort de Nicolas Le Valois, l'aîné Louis prend possession de l'Hôtel, mais s'en fatigue vite et l'abandonne pour seulement tirer profit de cette magnifique demeure.
    Ainsi, la ville de Caen loue l'Hôtel pour y loger essentiellement Charles de Matignon, Lieutenant Général de Normandie. Par ailleurs, des boutiques font leur apparition au rez-de-chaussée sur la Place Saint-Pierre, dès cette époque.
    Au début du XVIIe siècle, le petit-fils de Nicolas Le Valois, Jean, vend l'Hôtel à Guillaume Moisant, riche marchand de Rouen, enrichi dans le commerce des draps.
    Jacques Moisant, fils de Guillaume se retire à Caen pour s'adonner complètement au culte des Belles-Lettres et il prend l'habitude de réunions toutes les semaines, le lundi, au carrefour Saint-Pierre, réunions faites de nombre d'honnêtes gens sans emploi, venus là au moment de l'arrivée de la poste de Paris.
    Ces réunions, contrariées parfois par le mauvais temps, vont se dérouler tout naturellement dans la maison voisine de Jacques Moisant qui leur sert d'abord de refuge, puis de siège permanent, lorsque se constitue en 1652 l'Académie des Arts et des Belles-Lettres, à laquelle Jacques Moisant concédera pour ses assemblées l'une des plus belles salles de la demeure.

    Destinée

    Jacques Moisant, comme avant lui son père, n'occupait pas la totalité du vaste hôtel, et il restait des locaux très importants que la ville destinait aux grands dignitaires passant par Caen, et secondairement à servir d'habitation permanente aux représentants du roi.
    Ainsi, en 1614, Monsieur de Matignon, Lieutenant Général de Normandie, a marqué son passage au point que l'on parla après lui d'un Hôtel de Matignon, et non plus de l'Hôtel du Grand Cheval.
    Progressivement, la ville profitera de différentes occasions, comme la Révocation de l'Edit de Nantes, et l'exil de Robert Moisant en Hollande, pour acquérir certaines parties de l'Hôtel, dont elle assura ainsi l'entretien qui s'avérait très onéreux pour les héritiers de Moisant.
    Sans entrer dans les détails, la ville en fera donc l'Hôtel de Ville, en en faisant profiter certaines associations, dont : l'Académie de Musique, car des concerts pouvaient avoir lieu dans ses grandes salles.

    En 1750, les séances de l'Académie des Arts, Sciences et Belles-Lettres reprennent sous l'influence de M. de Fontette, promu protecteur de l'Académie.
    A la mort d'Alexis de Touchet, sa veuve, Catherine Moisant, seule propriétaire d'une partie encore importante de l'hôtel, vendit l'aile gauche à la ville qui voulait y installer la Juridiction Consulaire. Mais l'installation ne fut pas réalisée, et cette partie de l'hôtel fut affectée au service de la poste, lors de la Révolution et fut par la suite revendue à différents propriétaires le 8 Vendémiaire an V. Elle fut transformée en magasin.
    L'aile droite de l'hôtel voit défiler la Juridiction Consulaire et l'Édilité (jusqu'à ce que celle-ci s'installe au Séminaire des Eudistes), puis la Bourse de Commerce, la Chambre de Commerce de Caen, avec le Tribunal de Commerce et le Conseil des Prud'hommes. Au passage, la réapparition de concerts avec l'accueil de la Société Philharmonique du Calvados en 1827 anime l'hôtel ainsi que la Société des Beaux-Arts.
    Aujourd'hui l'Office du Tourisme continue la tradition d'utilisation par les Services Publics, en raison de la situation de l'hôtel au centre de la ville.

    Pourquoi "hôtel du grand cheval"

    La porte d'entrée de l'hôtel était ornée dans son tympan d'un remarquable bas-relief qui représentait

    "un homme à cheval, en petit, sur un tas de corps morts et des chevaux que des oyseaux mangent,il est tourné du côté de l'orient ... et, au-devant de luy le faux profette y est représenté,et le dragon à plusieurs testes et des cavaliers contre lesquels le cavalier semble aller.Il tourne la teste en derrière, comme pour voir la représentation du faux profette et du dragon qui entre dans un vieux château, d'où il sort des flammes, dans lesquelles ce faux profette est desja à moitié corps".

    Ce bas-relief était surmonté par un

    "grand cheval en l'air ayant des nuées soubs ses pieds de devant.L'homme qui est dessus avoit une espée devant lui mais elle n'y est plus. Il tient en sa main droite une longue verge de fer ; au-dessus de luy et derrière luy il paroist en l'air des cavaliers qui le suivent et devant luy
    et au-dessus un ange dans le soleil ... Il y a de l'écriture sur la cuisse du grand cavalier
    et à plusieurs endroits comme le roys des roys, le seigneur des seigneurset autres tirés du XIXe chapitre de l'Apocalypse."

    On peut avoir une idée de cette décoration en étudiant le tympan de la porte du pavillon sud, au fond du vestibule. Toutes les décorations de l'hôtel ont donné lieu à de nombreuses interprétations; elles sont inspirées de quelques versets de l'Apocalypse de Saint Jean et traduisent des scènes macabres rappelant un drame ou un fait sanglant que l'on peut sans doute interpréter comme la traduction d'une vengeance divine ou l'allusion aux horreurs de la guerre, comme le traduit clairement le cavalier dont la monture piétinait un amoncellement de cadavres d'hommes et de chevaux.